La genèse

 En ces mois de janvier et février 2010, je me sens particulièrement fatigué. Depuis quelques années je perçois une plus grande difficulté à exercer mon métier d’instituteur, gros consommateur d’énergie. A 53 ans, je me dis que l’âge y est sans doute pour quelque chose et que le caractère de plus en plus  indiscipliné des élèves (et de leurs parents !), ainsi que les contraintes administratives d’une Education nationale de plus en plus bureaucratique n’arrangent pas les choses. Je patiente donc jusqu’aux vacances de février en comptant sur celles-ci pour me remettre d’aplomb. Quand en fin de vacances je m’aperçois que mon état ne s’améliore pas vraiment, je me décide à consulter mon médecin traitant qui prescrit une analyse sanguine. Elle révélera un taux d’hémoglobine  dans le sang d’environ 8 g/dL, alors que la normale pour un homme se situe entre 13 et 15 g/dL. C’est l’anémie. Mon médecin me téléphone afin de me fixer rapidement un nouveau rendez-vous pour en trouver les causes. Il prend rendez-vous pour une consultation chez un gastro-entérologue, et prescrit également une échographie. Celle-ci révélera la présence d’une masse d’environ 8 cm de diamètre sur le haut de l’intestin grêle. Le radiologue prend immédiatement rendez-vous pour un scanner.

Muni des résultats de l’échographie et du scanner, je me rends chez le gastro-entérologue qui décide de me faire hospitaliser, dans un premier temps pour effectuer des examens complémentaires. Décision sera prise de tenter une chirurgie pour enlever si possible la masse étrangère, après m’avoir fait une transfusion sanguine destinée à me remettre en condition physique acceptable.

L’opération, faite à la mi-mars, se déroule correctement. La masse est située sur l’intestin grêle, et n’englobe aucun vaisseau. On sectionne donc une partie de l’intestin pour l’enlever. Le réveil sera douloureux : mon diaphragme se contracte sporadiquement, provoquant des douleurs insoutenables à tel point que je ne peux parler pour en expliquer les raisons. Après une nuit passée tant bien que mal sous morphine, je réussis à me faire prescrire un antispasmodique qui réglera le problème.

J’aurai une autre épreuve postopératoire à subir : une sonde gastrique dont le rôle est d’évacuer les secrétions stomacales que mon système digestif n’est plus en mesure de réguler. Ce tube provoque en effet une irritation  du larynx, m’obligeant à saliver et cracher en permanence pour évacuer ce trop plein de liquide buccal. Il m’est impossible de véritablement dormir. 

Hormis ces deux inconvénients, tout se passe bien et je pourrai même sortir quelques jours plus tôt que prévu, ayant fait l’effort de beaucoup marcher afin de favoriser la remise en route rapide du système digestif.  Je dois toutefois attentivement veiller à ne manger que lentement et en faible quantité. Deux repas familiaux durant lesquels j’ai oublié ces règles de base ont conduit à des épisodes particulièrement douloureux et pénibles.

La masse prélevée a été envoyée à un laboratoire pour biopsie. Rendez-vous avait été pris avec mon chirurgien à la mi-avril pour faire le point sur l’évolution de mon état. N’ayant pas été contacté avant ce rendez-vous, et adepte de la philosophie du « pas de nouvelles, bonnes nouvelles ! », c’est sans angoisse que j’attendais cette rencontre.

Le chirurgien m’annonce qu’il s’agit d’une tumeur maligne qui présente un haut risque de récidive ; il m’a fixé un rendez-vous avec un oncologue ce même jour. Sa présentation des choses est telle que je ne sais finalement pas si  j’ai ou non un cancer, ni si celui-ci est grave. J’apprends par l’oncologue qu’il s’agit d’une tumeur stromale, appelée officiellement GIST, cancer touchant les tissus musculaires du système digestif, plutôt rare, et mis en évidence depuis seulement une dizaine d’années. L’état de développement de la tumeur est tel que je devrai suivre une chimiothérapie préventive d’un an afin de tenter de juguler les risques de récidive. La bonne nouvelle est que cette chimiothérapie ne nécessitera pas la pose d’un cathéter et des rendez-vous réguliers en centre de traitement ; il me suffira de prendre quotidiennement un comprimé d’un médicament mis depuis quelques années seulement  sur le marché, le Glivec, dont le principe actif est l’imatinib.

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